10 septembre 2022

Nous sommes sur InTime !

MARION HOUSSIN

"Je viens de Ribemont-sur-Ancre, une ville de 700 âmes dans le nord de la France, près d'Amiens. J'y ai passé mes 23 premières années, étudiant l'art et la gestion d'entreprise avant de déménager à Lyon et Paris pour travailler dans la communication. J'ai du mal à me définir à travers mon lieu de naissance, je pense que ce sont avant tout nos choix qui disent qui nous sommes : nous devenons nous-mêmes lorsque nous quittons notre lieu d'origine.

En 2021, j'ai créé la galerie d'art graphique Garance & Marion, avec Garance Laporte. Nous collaborons uniquement avec des artisans locaux, ce qui est pour nous une fierté et un trait distinctif. Nous allons à la rencontre du public depuis un an en créant des expositions itinérantes à Venise et en Vénétie, le prochain objectif est l'ouverture de notre espace dans la ville.

Depuis 2010, date de mon premier voyage à Venise et coup de foudre pour la ville, j'y reviens année après année, caressant le rêve de m'installer ici. En 2014, j'ai vécu ici pendant quelques mois et je me suis fait des amis. Fin 2019, je quitte la France et m'installe ici, dans un premier temps avec un stage à l'Alliance Française. Juste avant le déclenchement de la pandémie, j'ai rencontré Garance. Une amitié est immédiatement née et, de nos conversations, a émergé notre projet : ouvrir une galerie atypique dans la ville. Je voulais vraiment me rapprocher de Venise. J'étais dans une période difficile de la vie, je voulais tout quitter pour me retrouver et c'était la bonne ville. Ici, je me suis senti revivre et j'ai décidé de trouver un moyen de rester ici et de créer un avenir ici : précisément la galerie.

Je pense que j'ai un besoin viscéral d'être entouré de beauté, je n'aurais pu faire d'autre choix que Venise. J'ai une relation fusionnelle presque passionnée avec Venise. Parfois, quand ça m'exaspère, je m'en éloigne, mais ça me manque. Ceux qui choisissent de vivre ici éprouvent souvent ce sentiment d'intimité avec la ville. Luigi Groto le dit très poétiquement, dans son éloge funèbre de Venise en 1570 : « de ce désir de revenir, qui pèse sur tous ceux qui la quittent, il prend le nom de Venise, comme pour dire à ceux qui partent, en un doux prière : Veni etiam, reviens ».

Ce qui me frappe à Venise, c'est qu'on peut toujours y vivre sans la connaître complètement. Il y a toujours une calle, un passage, une statue, une lumière différente, Venise se permet mais se moque de nous. On croit le savoir mais on se trompe, c'est ce qui le rend unique et magique. J'aimerais voir tous les bâtiments et bâtiments fermés et abandonnés reprendre vie, j'aimerais qu'ils reprennent vie grâce à des projets culturels ou sociaux, j'aimerais que les habitants reprennent de l'espace, que la politique leur donne un façon de le faire. Il y a énormément de projets à réaliser à Venise, la ville le mérite et nous le leur devons. "

GARANTIE LAPORTE

" Je suis né et j'ai grandi à Pau, dans le sud-ouest de la France, entre les Pyrénées, l'océan Atlantique et la frontière avec l'Espagne. J'ai également vécu à Bordeaux, en Angleterre et à Paris. Historienne de l'art, j'ai côtoyé l'univers des musées institutionnels. Aujourd'hui je suis co-fondateur avec Marion Houssin de la galerie Garance & Marion, un espace dédié aux arts graphiques qui présente une sélection d'oeuvres en édition limitée, numérotées et signées à des prix accessibles.Nous faisons beaucoup de choses : commissariat et organisation d'expositions, comptabilité , communication, développement de notre entreprise. En tant qu'entrepreneur, c'est un métier à 360° dans lequel on apprend tous les jours.

J'ai découvert Venise à l'âge de 5 ans et j'y suis revenue adolescente. J'ai commencé à rêver de l'Italie enfant grâce à l'enseignement passionné de mes parents, amoureux de ce pays. J'ai déménagé ici il y a 6 ans, j'ai obtenu un stage au Palazzo Fortuny en 2016 qui est devenu un emploi pendant 4 ans. Grâce à cette formation j'ai pu apprendre de nombreux métiers qui me sont encore indispensables dans la galerie d'art aujourd'hui : inventaire, conservation, organisation d'expositions, commissariat, création de catalogues.

Il est difficile de mettre des mots sur une histoire d'amour aussi forte. Pourquoi oui : J'ai un véritable amour pour cette ville. Je ne peux pas vivre sans Venise ; parfois je dois la quitter car elle m'étouffe, elle m'agace, mais au bout d'une journée elle me manque. C'est une ville spéciale qui n'a pas d'égal. Mon regard a naturellement évolué depuis mon arrivée mais, malgré ses dysfonctionnements contemporains, Venise se sent plus forte. Les sentiments sont amplifiés ; ici j'aime plus et je pleure plus qu'ailleurs. J'ai trouvé un équilibre parfait; cette ville me calme dans ma vie toujours occupée et trépidante. Je ne peux même pas compter les histoires dignes d'un film qui se sont produites ici; Je ne suis même plus sûr qu'il s'agisse de coïncidences, mais simplement d'une évidence.

A Venise j'aime la lumière qui se pose sur chacun de ses éléments architecturaux ou naturels. C'est différent chaque jour. J'aimerais voir un autre type de tourisme dans cette ville et une Venise plus paisible où les Vénitiens de souche accueillent les Vénitiens de tout cœur sans mépris. Venise doit retrouver son plus grand atout : l'ouverture internationale. Mais pas seulement pendant la Biennale, ou à la Biennale. Que sa culture artistique, culinaire et artisanale soit véritablement valorisée, que la transmission et l'enseignement soient un plaisir et non un fardeau. Ces dernières années, j'ai rêvé d'entreprendre et de valoriser l'art d'une manière différente et plus accessible à Venise ; il m'a suffit pour cela de rencontrer une grande amie, Marion, qui avait la même envie de faire et pas seulement de dire. C'est ainsi qu'est née notre galerie. "

Tout le magazine ici !

Merci Waterline.

Photo: Irène Gittarelli